Le voyage d’Etienne Crémieu-Alcan

Écho d’Alger, 11 février 1938

J’ai toujours aimé ces grandes nouvelles. Elles représentent tant de menues pensées pour celui qui se lance ainsi dans l’aventure.


Elles deviennent si transparentes pour nous qui ne vivons plus dans cet espace temps.

Rassembler ses affaires, ses papiers d’identité et de voyage, le passeport et les différents billets. Le billet Air France coûte 800 frs., 1440 frs. pour l’aller-retour. Je ne pense pas que ce soit les tarifs de la première classe. Et lorsqu’on part en février, il faut se munir de vêtements moins chauds pour l’arrivée. Le manteau devient inutile… On a droit à seulement 7 kg de bagages.

Dans ces années, Etienne réside en région parisienne. Comment se rendre à l’hydrobase marseillaise ? Prendre le train pour Marseille, ou prendre un avion ? Le voyage sera-t-il long, ou très long ? En tous cas, il faut au mieux trois heures et vingt minutes pour se rendre à l’hydrobase de l’Agha à Alger, depuis Marseille, ou plutôt l’étang de Berre. Bon, c’est lorsque le mistral est occupé ailleurs ! Car le trajet peux aller jusqu’à 7 heures. Jean Espitalier, sur son carnet de vol, consigne des temps qui oscillent entre quatre et cinq heures trente en septembre 1936. Peut-on aujourd’hui imaginer une telle incertitude dans la durée qu’occupera un voyage ?

Il faut ensuite prévenir que l’on arrive, savoir où l’on va dormir, au moins la première nuit. Il faut se munir d’argent, ou de chèque de voyages de la maison Cook ou de l’American Express. Sans compter un contrôle des changes assez tatillon qui limite la quantité d’espèces.
Et puis, il faut se dire au revoir, rassurer ses proches, avertir les autres de son départ. Est-on jamais certain d’éviter le crash, de revenir ? Je n’ose imaginer, connaissant le caractère d’Etienne, ce que pouvaient être ces scènes.

Ainsi, Etienne est arrivé à Alger d’après le journal du 11 février 1938. Il a pris place dans la cabine du Bréguet 530 Saïgon baptisé « Tunisie » et immatriculé F-AMSX. Un avion acheté par la compagnie Air Union, construit à deux exemplaires, l’autre étant « Algérie » (F-AMSV). Il possédait trois cabines. Et pouvait emporter jusqu’à 20 passagers. A l’arrière, une cabine très luxueuse pour deux ou trois passagers, la première classe au milieu pour 6 passagers et enfin, à l’avant, sous la cabine du pilote, la seconde classe et sa dizaine de fauteuils.

C’est le 21 avril 1936 qu’a lieu le premier vol commercial Marseille-Alger de ce Bréguet 530 Bizerte F-AMSX, piloté par Jean Mermoz. Est-ce que Jean Espitalier était toujours sur cette ligne en 1938 ? La traversée s’effectuait à 235 km/h grâce à trois puissants Hyspano-Suiza de 875 chevaux, placés dans des nacelles au-dessus de l’aile.

Il demeure une inconnue. Pourquoi entreprendre ce voyage ? La destination finale était-elle bien Alger ?

Je dois toutes ces informations à JN Passieux et son excellent site que je ne saurais trop vous conseiller. Le carnet de vol de Jean Espitalier est cité par Pierre Jarrige.

Auteur : Crémieu-Alcan

Professeur en collège, Docteur en Histoire. Travaille sur les usages pédagogiques du web 2.0. Anime la classe Médias du collège Dupaty (une classe PEM) Site Perso : miscellanees33.wordpress.com, Les100livres.wordpress.com

3 réflexions sur « Le voyage d’Etienne Crémieu-Alcan »

  1. Bonjour, Merci beaucoup de partager ces souvenirs. Petite précision, le Breguet 530 Saïgon était la version civile du Breguet 521 Bizerte, lequel était en service dans l’Aéronavale. Mon grand-père était pilote de ce dernier appareil, et notamment commandant d’une flottille stationnée à Mers-el-Kébir un certain 3 juillet 1940 de triste mémoire. Il a toujours salué les qualités d’endurance et fiabilité de cet appareil… pour l’époque, ce en quoi il était d’accord avec Jean Mermoz.
    Cordialement, Christophe

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